Profitant de mon ignorance, mon patron m’a fait signer un contrat de travail qui m’empêche de saisir la justice en cas de litige. Que faire ?
Engagé dans un établissement Commercial en 2009 à Bobo Dioulasso en qualité de chauffeur, mon patron me demanda de signer certains papiers où il était question d’accepter un salaire mensuel de vingt huit mille (28 000) francs CFA tout en renonçant de saisir la justice en cas d’un éventuel litige qui nous opposerait. Une fois entré en fonction, il entreprit de m’offrir chaque mois un sac de riz et un sac de maïs pour satisfaire aux besoins nutritifs de ma famille. Comble de surprise, en octobre 2013, il me renvoie du travail suite au rapport du garagiste qui constate certaines maladresses sur le fonctionnement du véhicule. Il s’agit du retrait des pièces neuves du véhicule contre celles qui sont déjà hors d’usage. Et que l’auteur de ses actes ne peut être que moi, alors que je ne suis pas le seul usager de ce véhicule. Quoi qu’il soit, je tente de l’approcher pour qu’il revienne à des bons sentiments et si possible me remettre en service, ou à défaut s’attendre à ce que je touche la justice, il me brandit un billet de banque et me fait entendre que les papiers que j’ai signé au départ, le met à l’abri de toute poursuite judiciaire, et m’entêter à le faire n’aboutirait à rien. Merci. Un justiciable
Concernent votre inquiétude, elle renvoit à la valeur juridique des engagements pris au départ, à savoir, les papiers que vous aviez signé. Il s’agit inéluctablement d’une transaction qui a autorité de la chose jugée mais qui ne l’est pas, car la transaction suppose des concessions réciproques. Ici votre salaire est la contrepartie de votre travail et non votre renoncement à saisir la justice. Par ailleurs, en matière sociale, comme c’est le cas, l’action en justice est d’ordre public et les parties au contrat de travail ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles légales en matière de licenciement. Car, au delà du travailleur, elles visent à protéger la société. Dans votre cas précis, en votre qualité de travailleur, la loi du travail vise non seulement à vous protéger, mais à protéger également votre famille (déclaration à la caisse de sécurité sociale). (Article 2044 et suivant du code civil de 1804)
Ceci dit, les papiers signés ne constituent pas un handicap à la saisine de l’inspection du travail de Bobo Dioulasso (lieu de conclusion) ou de Ouagadougou (lieu d’exécution) afin d’un règlement amiable de votre litige. Vous disposez à cet effet d’un délai de cinq (5) ans à compter de la date à laquelle il vous a remercié (75).
Au niveau de l’inspection du travail, vous indiquerez que le contrat qui vous lie à votre employeur est à durée indéterminée. Car le code du travail (loi n°028-2008 AN) du Burkina Faso prévoit en cas de rupture, un préavis notifié par écrit et l’observation d’un délai entre la notification et la rupture (65 et 68). Le préavis n’interviendra pas s’il s’agit d’une faute lourde (69). En outre, vous ferez remarquer que le motif de licenciement n’est pas fondé et qu’il s’agit d’un licenciement abusif.
Rupture irrégulière, licenciement abusif, salaire inférieur au SMIG, non affiliation à la CNSS sont des moyens qui vont vous permettre, soit d’infléchir la position de votre employeur afin qu’il vous reprenne, soit d’obtenir qu’il vous paye des indemnités compensatrices de préavis, indemnités de licenciement, des dommages et intérêts des différentiels de salaire par exemple.
En cas d’échec de règlement amiable, l’Inspecteur du travail dressera un procès verbal (PV) de non conciliation. Avec ce P.V, vous saisirez le tribunal de la même circonscription administrative de l’inspecteur du travail qui a dressé le PV (Bobo ou Ouaga) par écrit ou verbalement au niveau du greffe.
Abdoul Dramane KABORE