Jugement des ex-RSP : Les frissons d’une preuve qui peut faire peser la balance du juge dans l’autre sens
Le procès des militaires suit normalement son cours au tribunal militaire. Tous les conseils sont appelés à plaider en faveur de leurs clients afin que la sentence qu’a requis le commissaire du gouvernement pour leurs clients soit minimisée voir réfuter par le président du tribunal. 11 plaidoiries ont été déjà faites pour 12 accusés. Les avocats sont « sereins » car pour eux, les preuves remises au juge dans la matinée du 16 janvier dernier pourront peut-être basculer sa balance. Le temps étant un bon conseiller, il nous donnera par la suite le poids de ces preuves dans ledit procès.
Dans leurs plaidoiries, les avocats de la défense ont encore fait mention des noms que leurs clients avaient cités quand ils comparaissaient devant la barre. Leur souhait reste toujours la comparution de ces personnes devant le tribunal. Le caporal IDO Claude qui se trouve actuellement en mission au Mali, le général Pingrenoma Zagré, le Général Gilbert Diendéré et l’ex-premier ministre Yacouba Isaac Zida, sont entre autres les personnes que les avocats ont souhaité voir devant la barre pour la manifestation de la vérité. Au stade actuel des faits, l’on constate que ce ne sont que des témoins actuellement en détention à la MACA (Maison d’Arrêt et de Correction des Armées) que le juge a estimé nécessaire de faire comparaitre. KINI Eric et Ouattara Abou, puisse qu’il s’agit d’eux, ont, pendant leur comparution devant le tribunal pour leur témoignage, corroborer les dires des accusés.
Le peuple attend justice, dit-on ! Mais de quelle justice peut-il s’agir ? La vraie justice bien sûr ! Les accusés ce sont défendus en citant des preuves. Pour la libre manifestation de la vérité, ces preuves devraient être prises en compte.
Le « poids » du compte rendu tant chanté par le commissaire du gouvernement
Le commissaire du gouvernement avant de requérir certaines peines pour les accusés, s’est basé sur sa formule magique ; laquelle formule a été utilisée pendant toute l’audience devant le tribunal. « Le compte rendu libère le subordonné… ». Cette formule a encore été utilisée pour reformuler les différentes réquisitions à l’endroit des accusés même si l’on sait que ce n’est qu’un petit morceau de la formule que le commissaire du gouvernement a utilisé, occultant ainsi l’autre partie qui dit que « … le compte rendu doit être cohérent et engage la hiérarchie », cité par un accusé, visiblement éveillé que certains sur le plan de l’assimilation des cours de « sécurité militaire » qui leur avaient été donnés pendant leur formation. Vu cette démarche, les avocats de la défense se sont encore offusqués du comportement du commissaire du gouvernement. « il n’a passé le temps qu’à faire des déductions, des inductions et des raisonnements par analogie pour, par finir, demander la condamnation de presque tout le monde », s’est indigné un avocat. Pour le commissaire du Gouvernement, le fait de n’ayant pas rendu compte à la hiérarchie suppose que l’intéressé consentait le projet déballé par Madi Ouédraogo, donc est coupable de son silence.
Et quand le juge reçoit des preuves accablantes qui infirment ces allégations… !
Le caporal Madi Ouédraogo, devant la barre a déballé en long et en large le projet « machiavélique » qu’a voulu lui confié Yacouba Isaac Zida. Il dit avoir fait part de ce projet à sa hiérarchie. Et dans la nuit du 29 au 30 juin 2015, les personnes qui ont accepté ce plan ont été pris « la main dans le sac ». Pour donner plus de crédit à ses allégations, le caporal a dit détenir des preuves. Ces preuves, à en croire les avocats de la défense, sont un enregistrement vidéo d’une rencontre publique présidée par le général Pingrenoma Zagré, accompagné par le général Diendéré et bien d’autres haut gradés de l’armée sur l’arrestation de ceux qui allaient attaquer la maison de Salifou Diallo, mais aussi des photos des véhicules utilisés pour effectuer la mission ainsi que celles des stupéfiants. Ces personnes, sous l’ordre de la hiérarchie, ont été incarcérées à l’époque. C’est donc dire que les propos du caporal Madi ne sont pas inventés. Ils sont réels. Cette preuve combien accablante, peut faire frémir le cœur du juge et basculer la balance vers l’autre sens s’il estime, dans son intime conviction, que la vidéo ainsi que les images produites par les avocats de la défense en guise de preuve, sont exploitables. C’est dire que le refrain du compte rendu n’a fait aucun effet sur l’acte du caporal Madi Ouédraogo devant sa hiérarchie car au lieu de juger ceux qui marchaient pour le coup de Zida, ce sont plutôt ceux qui l’ont dénoncé qui payent aujourd’hui le lourd tribut de cette dénonciation.
De tout ce qui se passe devant le tribunal avec le dossier Madi Ouédraogo et 28 autres, l’on se fait déjà le dessin des procès des « grands » dossiers qui pendent toujours en justice à savoir le dossier du putsch et de l’insurrection. Que notre justice s’émancipe et qu’elle démontre aux yeux de tous ceux qui la dénigrent, qu’elle est une « justice démocratique » et une justice qui rend la vraie justice.
Alida Dorcas Touré