Procès du putsch manqué de septembre 2015 : Le grand déballage du Touareg à la barre
Le procès du putsch manqué de septembre 2015 s’est poursuivi avec l’interrogatoire de Roger Koussoubé alias le Touareg, comparaissant à la barre depuis le mardi 10 juillet 2018. Il est passé à la barre le mercredi 11 juillet et son interrogatoire se poursuivra le vendredi 13 juillet 2018 dans la salle des banquets de Ouaga 2000 réquisitionnée pour la circonstance. Au cours de son interrogatoire, le Touareg a fait des révélations qui ont fait vibrer la salle d’audience.
Le sergent-chef Roger Koussoubé alias le Touareg est né en 1976 à Bobo Dioulasso. Il est marié et père de 5 enfants dont des jumeaux. Il est accusé d’attentat à la sureté de l’Etat, meurtres, coups et blessures volontaires, complicité de dégradation de biens, incitation à commettre des actes contraires au devoir et à la discipline. L’accusé dit reconnaitre « partiellement » les faits en insistant sur la dégradation des biens parce qu’il affirme avoir apporté sa contribution au débranchement des appareils à la radio savane FM. A savane FM, il s’est rendu par « simple curiosité » quand il a appris que la « radio de la résistance » émettant sur ses ondes.
Au cours de son interrogatoire il a fait des révélations qui ont vibré la salle d’audience suscitant des réactions de part et d’autre. Le président du tribunal Seydou Ouédraogo a dû user de sa voix imposante pour appeler l’assistance au silence.
Il a révélé que l’ancien premier Ministre Zida, dans un appel téléphonique qu’il a eu avec lui, l’a invité à travailler avec le capitaine Flavien Kaboré, son chef de garde rapproché, pour la cohésion du corps parce qu’il veut un « RSP uni, fort et puissant ».
Le caporal Da Sami et le sergent-chef Koussoubé ont déjoué un coup le 25 juillet 2015. Lequel coup a été orchestré par le major Badiel Eloi épaulé par l’adjudant Nion Jean Florent, selon le récit du Touareg à la barre. Ce jour-là, selon le récit de Koussoubé à la barre, « si 5 minutes passaient, il serait trop tard » parce qu’avec leur intervention, « l’ancien premier ministre Zida et le colonel Auguste Dénise Barry ont (pu) quitter précipitamment le conseil des ministres ».
Le major Badiel et d’autres éléments du camp Bassolé organisaient des réunions au camp et ces réunions ont été détectées par le Touareg en sa qualité d’agent de renseignement discret. Il entend encore faire d’autres révélations s’il a la garantie que sa vie et celle de sa famille seront en sécurité. Le parquet prend acte et le rassure qu’il sera toujours protégé.
« Nous suivions une piste sur des mercenaires qui étaient formés dans un quartier de Bobo-Dioulasso. Ils faisaient rentrer des armes et il y avait des gens qui les logeaient », a révélé le Touareg, refusant de faire toute autre révélation sur la stratégie de ces mercenaires et l’identité de ceux qui les logeaient. Le parquet n’a pas voulu que d’autres révélations se fassent en public parce qu’elles pourraient porter atteinte à la sécurité militaire. Le président du tribunal Seydou Ouédraogo pourrait poursuivre l’audience en huis clos, si les révélations qui sont faites par le Touareg s’avéreraient nécessaires pour la manifestation de la vérité. Le parquet militaire dit prendre ces révélations avec réserve parce qu’il dit détenir des preuves impliquant fortement l’accusé dans le putsch.
Roger Koussoubé continue ses révélations en livrant les clauses de la rencontre qu’il y a eu entre le RSP et le président sénégalais Macky Sall venu en médiation pendant les évènements. De cette rencontre, il est ressorti que le président Michel Kafando devra demeurer président jusqu’à l’élection d’un nouveau président avec un régime légal. C’est ce nouveau président qui pourrait décider de la dissolution ou non du RSP. Le général Diendéré devrait être le vice-président de la transition. Il était convenu de trouver un asile pour le PM Zida et de l’amnistie pour le CND. Les familles des victimes seront dédommagées à hauteur d’un million de dollar.
Après toutes ses révélations, les conseils de l’accusé (maitres Alexandre Sandwidi et Michel Traoré) ont demandé que des dispositions soient prises pour la protection de leur client parce qu’ « au-delà d’être un accusé à la barre, il apparait comme un témoin gênant ».
L’audience se poursuivra le vendredi 13 juillet 2018 à 9h avec l’interrogatoire du Touareg.
Alida Dorcas TOURE